Les 4 révolutions du Docteur Bethwaithe

Quand le maître raconte l'histoire.

franck bethwaitheDans la famille Bethwaite, je voudrais le père…

S’il y a bien une personne dans le monde à qui la voile légère doit beaucoup, c’est bien Frank Bethwaite. Le renouveau de la voile légère des années 90 est en grande partie le résultat de ses recherches scientifiques, de ses dessins et d’un de ses livres ! En effet, ce célébrissime régatier du Northbridge Sailing Club et père du non moins célèbre Julian a publié un livre  » High Performance sailing  » dans lequel il apporte un nouveau regard sur un siècle de voile légère de par le monde en plus et avant tout de révolutionner l’approche de la vitesse en voile. Du point de vue historique, il distingue ainsi 4 révolutions dans cette histoire pleine de bruits et de fureur qui ne signifierait rien s’il n’était pas passé par là !

Première révolution selon lui, les travaux de Manfred Curry en 1925. Ils rendent enfin compréhensibles les principes aéro et hydrodynamique qui régissent la marche d’un bateau ! Pour la première fois dans l’histoire, la navigation et l’architecture navale deviennent une science à part entière. Ce faisant Manfred Curry ouvre une brèche dans laquelle vont s’engager tous ceux qui deviendront les grands architectes de l’après-guerre.

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La deuxième révolution a lieu en 1935 quand le génial Uffa Fox, le plus excentrique des architectes et des régatiers anglais, dessine Avenger et remporte la majorité des courses auxquelles il participe. Ce 14 pieds international est en effet l’un des premiers bateaux dans l’histoire à planer au portant. Il s’agit d’une véritable révolution parce que pour la première fois un bateau dépasse sa vitesse limite, fonction de sa longueur à la flottaison. Dès lors pour gagner, plus besoin d’avoir le plus grand bateau, celui qui coûte le plus cher, plus besoin d’avoir des dizaines d’équipiers. Bref cette révolution d’ordre sociologique est un véritable bouleversement dans l’histoire du sport en général parce qu’elle va à l’encontre d’un certain élitisme qui prévalait alors dans le sport en général et dans la voile en particulier !

La troisième révolution a lieu dans les années 60 : les meilleurs 505 et Flying Dutchman se mettent à planer au près ! Les trapèzes deviennent monnaie courante sur les bateaux et la pratique de la voile légère explose de par le monde et particulièrement en France. Les carènes des bateaux deviennent encore plus planantes à l’image des 14 pieds en GB et des 18 Pieds en Australie (inconnus en Europe à l’époque).

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La quatrième révolution est tactique et liée à la puissance augmentante des bateaux : il devient plus avantageux de tirer des bords de largue pour descendre à la bouée sous le vent que de tracer plein vent arrière . La tactique ne se limite plus aux bords de près et la moindre erreur dans le choix d’un bord se révèle catastrophique !
Pour nous jeunes régatiers de ce début du siècle 21 cette histoire nous paraît aller de soi. Et pourtant s’il n’y avait pas eu des gens comme Frank Bethwaite pour la théoriser et en être un des acteurs, les skiffs des années 90 auraient-ils vu le jour ?

A ces quatre révolutions qui sont des idéaux-types, il conviendrait sans doute d’en rajouter une cinquième, celle des Bethwaite eux-mêmes, celle qui consiste à dessiner des bateaux pour aller plus vite que le vent. Une dernière révolution équivalente à celle du passage du mur du son par les avions !
Les Laser 4000 et 5000, les ISO et BUZZ, les 49er les 29er… sont tous des bébés de Frank Bethwaite, nous sommes tous des skiffeurs Australiens ! Maintenant à nous de poursuivre l’histoire de la voile légère !

Bibliographie :

  • L’histoire du yachting de Daniel Charles chez Arthaud (l’ouvrage de référence, une bible, un chef d’œuvre, une merveille, un enchantement….)
  • Un hors série (n°12) de Voiles et Voiliers écrit par Eric Vibart et François Chevalier (une très bonne approche synthétique par des gens cultivés)