RATINGS BSP

Les ratings breizhskiff
Philosophie et méthodologie

Philosophie breizhskiff sur les ratings.

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La course en temps compensé est aussi vieille que la compétition en voile. Faire courir des bateaux aux caractéristiques techniques différentes a toujours été un objectif à atteindre pour les régatiers afin d’assurer et de promouvoir la diversité de ce sport qui est une de ses richesses mais aussi son héritage. C’est donc une forme d’animation compétitive à part entière avec ses avantages et ses limites mais elle n’est pas une pratique par défaut qui serait mise en œuvre pour palier l’absence de volume de bateaux similaires pour courir en temps réel. Soyons clairs, au même type que la stricte monotypie, la course en temps compensé ne sera jamais parfaite et les systèmes de rating, qu’ils soient calculés ou statistiques et aussi précis soient-ils, ne pourront garantir une égalité absolue qui n’est qu’un leurre s’agissant de la compétition en voile.

La course en temps compensé est par contre le meilleur outil pour permettre à la voile d’embrasser toute sa diversité, de créer de l’adhésion, de l’inclusion et non pas de l’exclusion, et pour fédérer des régatiers quelque soit leur support de prédilection, leur gabarit, leur programme de navigation etc. La course en temps compensé est donc de ce point de vue un état d’esprit à part entière autour duquel se fédèrent des passionnés pour qui la diversité de la voile est une chance mais aussi quelque chose à promouvoir et à défendre pour la croissance de notre sport.
Les tables de rating et la course en temps compensé doivent dont être considérées comme des systèmes en permanente évolution visant un idéal (faire courir de manière équitable des bateaux et des équipages différents) tout en sachant qu’il ne pourra être atteint. Les systèmes de ratings sont d’autant plus acceptés qu’ils sont construits en concertation avec ceux qui les utilisent, y adhèreront et donc les feront exister. En cela, un système de ratings doit donc avant tout construit par ceux qui l’utiliseront et ne peut procéder d’une logique verticale, hiérarchique et déconcentrées, d’une seule institution. Il doit se construire à la base, se développer sur une logique transversale et décentralisée en fonction de réalité de terrain. Penser qu’il pourrait y avoir un système de rating universel est donc une illusion absolue parce qu’elle reviendrait à considérer que les caractéristiques techniques d’un bateau sont le seul facteur de performance ou du moins qu’il compterait plus que d’autres facteurs que sont les conditions météos, le type de plan d’eau, le niveau des équipages etc etc. L’idée qu’il pourrait y avoir un système de rating universel valable partout et pour tout le monde est donc la négation même de la pratique intérsérie en temps compensé.
La méthodologie utilisée pour créer, développer et faire vivre une table de rating est donc essentielle pour la pérennité de la course en temps compensé et de la pratique intersérie.

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Méthodologie de constitution de la table des ratings breizhskiff

Dès l’origine de breizhskiff et pour le premier trophée (2003), nous avons développé notre propre table de ratings. C’était une condition essentielle pour fédérer les membres de la communauté, les amener sur les lignes de départ de nos régates. C’est donc maintenant 14 ans d’expérience que nous avons accumulée et qui fait qu’aujourd’hui nous avons une vraie légitimité et une véritable expertise à parler course en temps compensé et système de ratings en France.

La table BSP annuelle est donc construite par les « administrateurs » de breizhskiff en concertation avec un comité de spécialistes et avec l’ensemble des membres de la communauté qui ont toujours la liberté de s’exprimer dans le cadre de discussions publiques sur les forums du site breizhskiff.

La table des ratings est validée avant le début de la saison sportive et s’applique pour tous les classements de chacune des épreuves du trophée.

Pour la construire, nous prenons en compte plusieurs éléments essentiels :

-Une valeur de rating doit viser à mesurer le potentiel du bateau en essayant de faire abstraction du niveau d’équipage. Chacune de nos réflexions part donc de la question suivante : quel serait le potentiel du bateau avec le meilleur équipage du monde dessus ? Autrement dit, dans notre démarche nous essayons d’évacuer au maximum la composante du niveau de l’équipage.
-Cela parce que pour nous une valeur de rating ne doit pas mesurer un niveau d’accessibilité technique d’un bateau et un niveau moyen d’équipage. Il est évident que pour un régatier moyen, il sera plus difficile de sauver son rating sur un bateau exigeant techniquement que sur un bateau beaucoup plus simple à faire marcher. Autrement dit nous ne considérons pas qu’une valeur de rating doive donner une illusion à un régatier sur son niveau mais doit plutôt montrer la marge de progression qu’il peut avoir dans sa pratique et par rapport à la maitrise de son support.
-Nous considérons qu’il est indispensable de se baser sur l’observation des différentes tables de ratings qui existent dans le monde. Comprendre comment sont établies ces différentes tables, quelles sont avec les années leurs évolutions globales sont des démarches impératives. Nous allons donc regarder comment un bateau évolue d’année en année mais également comment ce même bateau évolue par rapport à d’autres bateaux dans le temps. Une table de ratings c’est d’abord le produit une interaction permanente et de ce fait quelque chose qui ne peut être stable.

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Ces dernières années nous nous basons sur l’observation de trois grandes tables de ratings dériveurs.

  • La table des ratings de la RYA: c’est le seul système purement statistique qui repose sur l’analyse de milliers de données issues des clubs anglais depuis les années 1950. Il est aujourd’hui le système le plus complet et qui couvre la plus grande diversité en matière de pratique intersérie dériveur. Cependant, parce que cette table est purement statistique et la résultante de ce que les clubs anglais développent comme système de ratings au niveau local. Elle est une base et seulement une base. Cela est d’ailleurs très bien dit par ceux qui gèrent ce système et qui encouragent les clubs et les pratiquants à l’adapter aux réalités locales.
    http://www.rya.org.uk/racing/Pages/portsmouthyardstick.aspx

  • La table des Great Lakes: cette table est utilisée pour les classements de l’énorme circuit hivernal anglais en intersérie dériveur. Depuis 5-6 ans ce sont des milliers de résultats qui ont été pris en compte et alimentent la table RYA. Ce système n’est pas purement statistique : il y a un arbitrage humain fait par un comité avec à sa tête un ancien médaillé olympique. Cet arbitrage est lié au fait que ce circuit se fait majoritairement sur des plans d’eau intérieurs où les comportements des bateaux ne sont pas les mêmes qu’en mer. Pour les spécialistes de la RYA, ce que le Comité de GL a fait est la plus belle illustration de ce doit être une table de ratings par rapport à une base statistiques comme celle de la RYA.
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    http://greatlakes.org.uk/
    http://greatlakes.org.uk/The-Method.php
    Nous avons été en contact direct à plusieurs reprises avec le comité des Great Lakes pour échanger avec eux sur notre table de rating.

  • La Table HISC: cette table est utilisée par l’un des clubs les plus actifs en voile légère en Angleterre. Elle est intéressante parce qu’elle repose sur une philosophie très élitiste dans un club où naviguent les meilleurs de nombreuses classes. Il n’y a pas de pondération pour établir les valeurs. Ce sont les résultats des meilleurs qui font les ratings. Enfin, s’agissant d’un club ou le courant joue un rôle majeur dans les régates, le club a développé une méthodologie pour prendre en compte cette dimension dans l’établissement de ces ratings.
    http://www.hisc.co.uk/media/9010/hisc_handicap_description.pdf

Chacune de ses trois tables a donc ses avantages et ses inconvénients. Elles correspondent à différentes typologies de régates et répondent à des logiques précises qui recoupent celles de breizhskiff. L’observation de ces trois tables et de leur évolution dans le temps et les unes par rapport aux autres est donc essentielle pour établir notre propre table BSP. Elle nous permet de sortir des grandes tendances.

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Pour établir notre table, nous discutons et échangeons ensuite au sein du comité des ratings sur ce que nous avons observé sur les régates du circuit breizhskiff selon les conditions, les types de plan d’eau, les types de parcours, les équipages qui étaient présents ou non et pour lesquels nous avons depuis des années une bonne évaluation du niveau d’autant plus que la diversité des publics breizhskiff est très large. Nous avons des jeunes en accès au plus haut niveau, d’anciens athlètes de haut-niveau et des amateurs qui vont du débutant en skiff à l’amateur éclairé.
Nous attachons dans ces discussions une importance à plusieurs éléments en plus de ceux déjà cités :
• Le comportement du bateau selon trois types de conditions : en skiff, nous avons remarqué qu’on peut distinguer des différences assez marquées de comportement des bateaux selon trois types de conditions : petit temps, medium et brise. Cela nous permet souvent de faire les arbitrages sur les valeurs de ratings lorsqu’ils sont enjeux de débats.
• Nous attachons une attention particulière aux séries à développement : beaucoup de système de ratings sont toujours en retard pour prendre en compte les évolutions des bateaux et les améliorations techniques. Dans la mesure du possible nous essayons de les anticiper en nous tenant bien au courant de ce que seront les évolutions d’un grand nombre de bateaux qui participent au trophée breizhskiff. Il en va de même pour les classes monotypes dont on sait qu’elles évoluent (nouvelles coupes de voile, changement de gréement etc…) de plus en plus ces dernières années (logiques commerciales des constructeurs)
• Nous essayons dans la mesure du possible d’arrondir les ratings par pas de 5. Mais ce n’est pas une obligation que nous nous imposons parce que nous considérons que, même si elle est symbolique, une différence doit parfois être marquée. Aucun bateau n’est similaire, aucun rating ne devrait l’être même si la différence de niveau technique d’un équipage efface très vite la différence d’un ou deux points de ratings. L’idée donc de regrouper des bateaux différents sous un même rating au prétexte que la différence est quasi nulle est donc potentiellement inquiétante car elle produit de l’indifférenciation alors que l’essence même de l’intersérie c’est la reconnaissance de la différence et de la diversité.

Toutes ces observations, comparaisons, discussions et arbitrages débouchent sur la validation par les administrateurs de breizhskiff et le comité des ratings breizhskiff d’une table qui est consultable et discutable avant le début de la saison par l’ensemble des membres de la communauté et des régatiers. Après cette phase essentielle pour créer de l’adhésion et du consensus, la table retenue est publiée avant la première épreuve de la saison qui a généralement lieu au lac du Der le weekend de pâques.

Notre table évolue donc d’année en année : elle est aujourd’hui acceptée très largement et notre légitimité et notre expertise sont reconnues par les régatiers de la communauté ce qui est pour nous l’essentiel.